Deaths Games en littérature

En matière de littérature, tous les coups sont permis. Alors, quand la réalité fait s’exacerber l’imagination, l’imagination peut-elle dépasser la réalité ?

📸 Sigmund on unsplash

Romans d’anticipation dystopiques, l’avènement des jeux à mort

Le genre du roman d’anticipation a pour principale caractéristique que son auteur imagine un futur, plus ou moins proche chronologiquement et géographiquement, ce que pourrait être le monde. Ils puisent dans l’actualité et la société contemporaine l’inspiration qu’ils extrapolent ensuite en imaginant les évolutions qui pourraient en découler. Leur objectif ? donner un aperçu réaliste du futur. Utopie ou dystopie, le choix reste à faire.

Pour le thème qui nous intéresse ici, les jeux à morts, c’est vers la dystopie que nous nous dirigeons.

La dystopie est un récit de fiction, se déroulant dans un futur où tout semble perdu. Les terres sont infertiles, l’eau pollué, les sociétés sombrent dans la violence, la surveillance est exacerbée. Un terrain de jeu idéal pour mettre en garde contre les conséquences néfastes d’idéologies ou pratiques modernes.

Et parmi les pratiques modernes qui ont enthousiasmé l’imagination de nos auteurs contemporains, une est particulièrement prégnante : les jeux. Qu’ils soient télévisés ou non, les jeux ont un potentiel pour dégénérer qui ravie l’imagination des auteurs des XXe et XXIe siècle. Comme dans chaque jeux, tous les coups sont permis. Ou presque.

Des expériences de sociologie comme inspiration ? quand la réalité dépasse l’imagination.  

Parfois, la réalité dépasse de loin tout ce que l’humain pourrait imaginer. Deux expériences terrifiantes ont sans doute grandement impactés les auteurs et récits dont nous allons parler tout à l’heure. Des expériences de psychologie et de sociologie qui ont dépassé tout ce que l’imagination pourrait créer.

Les paragraphes suivants font l’objet d’un storytelling.

The Stanford Experiment, 2015.

L’expérience de Milgram

Nous sommes en 1960, aux Etats-Unis. Stanley Milgram est psychologue et il a une idée qui lui trotte dans la tête : mesurer le degré d’obéissance de la population américaine. Au matin, il réunit son équipe et leur soumet l’idée qu’il a échafaudé la nuit durant. Quelques jours plus tard, dans la presse, parait une petite annonce :

« Etude sur la mémoire. 4$ pour un heure de votre temps ! Nous recrutons 500 personnes pour réaliser une étude sur la mémoire, à l’université de Yale. Nous n’avons besoin de vous que pour une heure : il n’y a pas d’autres obligations. Vous devez avoir entre 20 et 50 ans. Les lycéens et étudiants ne peuvent participer. Si vous correspondez à ce profil, merci retourner le coupon ci-dessous au professeur Stanley Milgram, département de psychologie, Université de Yale, New Haven.»

Un mois plus tard, tout est prêt. Les participants retenus se pressent dans les locaux où ils gagneront facilement 4$. Alors que les uns entrent, sans savoir ce qui les attends, d’autres sortent, le visage parfois hébété, d’autres figés dans l’horreur.

C’est au tour de Pierre de se présenter devant le professeur. Le professeur l’invite à s’installer dans le fauteuil au centre de la pièce, face à un engin remplit de boutons. Au-dessus de chacun, un chiffre est indiqué. Sur la table, une liste de questions et de réponses. L’expérimentateur se présente, il est l’animateur de la séance de jeu. Pendant l’heure qui va suivre, un élève situé dans une pièce adjacente devra répondre aux questions que Pierre posera. Si l’élève se trompe, Pierre devra envoyer une décharge électrique. A chaque erreur, la décharge sera de plus en plus forte.

Pierre commence le jeu, posant la première question. Une question facile, aucun risque que l’élève échoue. Et pourtant… L’expérimentateur enjoint Pierre à presser le premier bouton. Un cri de douleur raisonne à travers la cloison. L’expérimentateur fait signe à Pierre de poursuivre. Une erreur. Pierre hésite, il a entendu le premier cri de douleur, la seconde décharge est plus forte encore ! Mais l’expérimentateur, dans sa blouse, lui assure qu’il n’y a aucun risque pour la santé de l’élève. De questions en questions, l’élève hurle de douleur sous le coup des décharges qu’il reçoit. La dernière question arrive. Une erreur. A nouveau… Pierre ne sait plus que faire. Sous le dernier bouton, la décharge la plus élevée est mortelle. Et pourtant, l’expérimentateur l’enjoint à presser ce bouton. Qu’il n’existe aucun risque pour l’élève. Alors, face à ce dilemme Pierre se soumet à l’autorité du scientifique. Il presse le bouton. Un dernier cri s’élève avant de s’achever dans un silence assourdissant.

Ce que Pierre ne sait pas, c’est que l’élève et l’expérimentateur sont des acteurs. Que les cris strident consécutifs à chaque décharge sont enregistrés. Personne ne souffre. Personne sauf lui. L’objectif de cette séance cruelle de jeu était de mesurer jusqu’où les femmes et les hommes sont prêts à aller, si une autorité leur affirme qu’il n’y a, aucun danger.

En savoir plus sur l’expérience de Milgram

L’expérience de Stanford

1971, 48h après le début de l’étude. Philip Zimbardo se redresse dans son fauteuil, oui il va poursuivre cette investigation. Tant pis si la situation devient encore plus incontrôlable qu’elle ne l’est.

Quelques mois plus tôt, face à 24 personnes dument sélectionnées, Philip Zimbardo annonce l’étude qu’il va mener avec eux. L’étude va durer deux semaines. Pendant ses deux semaines, les participants seront enfermés, sous l’œil des caméras. Un premier groupe sera constitué de prisonniers. Un second, de gardiens de prisons. La répartition des rôles sera fait aléatoirement. Chaque participants pioche d’une bille dans un pochon. Noire, ils deviennent prisonniers. Blanc, ils sont gardiens.

Aux prisonniers sont fournis une longue blouse et se voient interdire le port de sous-vêtement. Chacun recevait un matricule par lequel ils seront appelés pour la durée de l’épreuve. Alors qu’ils avaient reçu l’instruction de venir le jour 1 sur le lieu de l’étude, ils ont eu la surprise de ce faire arrêter par la police de Palo Alto, menotter et mené de force sur les lieux de détention. Aux gardiens venus en citoyens libres, sont fourni un uniforme militaire, des lunettes de soleil et une matraque. Une seule interdiction pour les gardiens : la violence physique. L’étude peut commencer.

Philip Zimbardo ne peut plus se voiler la face. L’étude a commencé à dérailler seulement 48h après le début. Les gardiens sont de plus en plus violent, infligeant des violences de plus en plus grande, enchainant les décisions humiliantes pour les prisonniers. Quatre jours plus tard, la situation est totalement hors de contrôle. Les prisonniers commence a présenter des troubles psychiatriques et physiques dut aux privations et punitions à répétition. Les demandes d’aides à la police de Philip sont restées lettre morte. Il aura tout essayé pour reprendre le contrôle de son étude. Mais cela n’est pas suffisant.

Christina Maslach, psychologue se présente à la prison pour mener des interview avec les participants à l’enquête. C’est avec effarement qu’elle découvre les conditions inimaginables dans lesquels évoluent les prisonniers et avec quelle liberté et cruauté les gardiens infligent des punitions. Ça décision est prise, l’expérience prend fin, tout de suite.

En savoir plus sur l’expérience de Stanford :

Quand la fiction imagine le pire : il n’en restera qu’un !

La thématique du jeu au travers d’un regard d’anticipation permet un terrain d’investigation sans limite. Tout peut être imaginé. Pour le meilleur et pour le pire.

Dans les années 50 a été diffusé le tout premier jeu télévisé. En 1971, les Etats-Unis lancent la première téléréalité. Deux événements majeurs du petit écran qui n’auront pas manqué d’interpeller les auteurs. Voici quelques récits de jeu télévisé/téléréalités mortels, au sens propre.

Le Prix du Danger, Robert Sheckley

C’est Robert Sheckley, qui en 1958, lance le bal des jeux télévisés mortels dans une nouvelle de science-fiction et d’anticipation. Nous y suivons un héros qui participe a des jeux télévisés de plus en plus dangereux. Le dernier auquel il se mesure veut se peau : dans Le Prix du Danger, il doit survivre à une traque à l’homme.

Marche ou crève & Running Man, Stephen King

Une première nouvelle qui aura également mit Stephen King sur la voie des jeux télévisés mortels. Il en aura créé deux, entre 1979 et 1982. Respectivement Marche ou Crève et Running Man. Deux romans d’anticipation dystopique, dans des société où la violence est omniprésente et dans laquels des participants se retrouvent pris dans des jeux… infernaux.

Avec Marche ou crève, se sont de jeunes volontaires qui se retrouvent pris dans une longue marche. Le but : marcher le plus longtemps possible. Un arrêt, c’est la mort. Un ralentissement, un avertissement. Au bout de 3, c’est la mort. Le dernier survivant est sacré vainqueur de ce jeu.

Dans Running Man, le participant d’un cruel jeu télé est traqué. Si il est découvert pas les tueurs lancés à ses trousses, c’est la mort qui l’attend. Le but, survivre pendant 30 jours. Un jeu sans foi ni loi. Chaque heure de survie rapporte 100€ ; s’il tue un officier de police, c’est 500€ qui sont ajoutés dans sa cagnotte. La seule condition pour toucher l’argent : envoyer chaque jour une cassette vidéo qui prouve qu’il est toujours en vie.

Battle Royale, Koshun Takami

Le japonais Koshun Takami sort son roman coup de poing (et succès indéniable) Battle Royale, en 1999. Dans une société futuriste, des élèves sont kidnappés et amenés dans un lieu isolé, sur une ile avec pour consigne de s’entretuer. Ils ont l’obligation de participer, des militaires sont chargés de leur surveillance. Le jeu prend fin quand le dernier survivant commet un dernier crime.

La Guerre Olympique, Pierre Pelot & Acide Sulfurique, Amélie Nothomb

Dans La Guerre Olympique, un roman de 1999, Pierre Pelot retrace une guerre entre le camp blanc et le camp rouge. Des champions s’affontent devant d’immenses foules aux cours d’épreuves plus mortelles les unes que les autres et dans lesquelles tous les coups sont permis. Les vaincus subiront dix millions de morts dans leur camps, l’exécution est directe, dès la proclamation des résultats.

Bien plus récemment, en 2005, c’est l’auteure francophone Amélie Nothomb qui se mesure à un terrible jeu télévisé, de téléréalité, qui s’inspire des pires moments de l’Histoire. Avec Acide Sulfurique, elle explore un camp de concentration, où des participants choisis au hasard dans la population sont enlevés par rafles. Les participants malgré eux souffrent chaque jour de la cruauté de leurs geoliers. Et chaque jour, sous les yeux des caméras, un participant est tué. Jusqu’à ce que ce soit les spectateurs, qui votent pour la prochaine victime.  

Hunger Games, Suzanne Colins

Entre 2008 et 2010, la littérature jeunesse s’attaque elle aussi à ce morceau cruel qu’est le jeu à mort. Si Battle Royale avait ouvert la voie, ses origines géographique le gardait tout de même relativement confidentiel par-delà les amateurs de culture jap’. C’est sur ce créneau que se place alors Suzanne Colins avec sa trilogie Hunger Games. Dans celle-ci, des jeunes sont sélectionnés pour participer au Jeu de la Faim. La règle est simple : tuer ou se faire tuer, mais surtout convaincre les spectateurs de voter pour eux.

Quelques autres titres pour la route

Si j’ai parlé précédemment de titres qui me parraissent les plus pertinent pour parler des Deaths Games au travers de la littérature ; mes recherches m’ont permis d’en découvrir plusieurs autres. Alors, afin de faciliter des recherches à d’autres qui seraient intrigués par ce sujet cathartique, voici quelques autres titres :

  • Devine qui vient mourir ce soir ?, Ben Elton (2007)
  • L’œil de Caine, Patrick Bauwen (2008)

Ce tour d’horizon des deaths games touche à sa fin. Avez-vous déjà lu certains récits abordés sur cette page ? En connaissez-vous d’autres à faire découvrir ? L’espace commentaire est ouvert, n’hésitez pas à  les partager avec d’autres curieux !

Quant à nous, nous nous retrouvons tout bientôt, pour un nouvel écho des mondes !

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